BELVEDERE EN OR


Mourez en esprit chaque matin et vous n’aurez plus jamais peur de mourir
HAGAKINE
La mer loin, comme un supplice plat.
Tu as écrit cette phrase comme ça
Et n’as pas de temps de l’écouter
Croître et palpiter, ni de savoir le goût de son énergie
De contact, de son dessin exact.
Pélion, le métier à tisser tes douleurs
Peut être cette science computationnelle que tu maîtrises.
Ne m’as-tu pas théorisé sur des ensembles majorés
Avec les algorithmes les plus humains que la mathématique explore?
Ne m’éblouissais-tu pas avec des prodiges de machines intelligentes
Faites par des doigts pithécanthropes?
Et, cependant, tu ne brûles
Qu’en jouissant face au Sébastien criblé de flèches
De Guido Renni, en faisant le pédé
Si marié étais-tu dans la nuit provinciale,
Ou t’abîmant dans la glue des petites vanités
De salon.
N’aie jamais l’idée, Pélion, que cette lettre
Est de conseil ou de reproche.
Seulement quelque chose de beau et de noble
Comme lorsque je t’ai vu au coucher du soleil
Au belvédère en or écrivant peut-être
La mer loin, comme un supplice plat
Ce qui m’a fait penser à toi, ami cordial, avec affection.
(Signaire, Telloc, 1984-1994)