Les sports en corse, miroir d'une societe

Scontri di 15.08.2018

Les sports en Corse, miroir d'une société

Sport in Corsica, spechju d'una società

Près de 350 objets et documents sont présentés (voiture de course, photographies, maillots de sport, articles de presse, vidéos, etc.)…

L’exposition « Les sports en Corse » permet de revenir sur plus d’un siècle et demi d’activités physiques et sportives, compétitives ou de loisirs dans l’île, à partir des regards croisés d’un historien et d’un sociologue.

Trop souvent encore, le sport n’est pas reconnu comme un élément culturel légitime. Cette question se pose, avec d’autant plus d’acuité, quand le sport s’invite au musée.

Pourtant en quelques mots, Albert Camus, prix Nobel de littérature en 1957, nous rappelle toute l’importance du phénomène sportif inscrit au cœur de nos sociétés, révélateur tout autant qu’annonciateur des évolutions socioculturelles.

« Car, après beaucoup d’années, où le monde m’a offert beaucoup de spectacles, ce que finalement je sais de plus sûr sur la morale et les obligations des hommes, c’est au sport que je le dois, c’est au RUA que je l’ai appris ».

ET LA CORSE DEVINT SPORTIVE…

La Corse, pleinement inscrite dans la mondialisation par l’intermédiaire du tourisme, du commerce et de la colonisation, ne peut échapper à l’attrait des nouvelles pratiques corporelles venues d’Angleterre dès le milieu du xixe siècle. Ces activités, conçues dans l’optique d’une transformation de la formation des élites confrontées aux enjeux de la révolution industrielle, n’en sont pas moins l’attribut ostentatoire du « Passe-temps de la belle existence », avant de devenir, au tournant du xxe siècle, une composante essentielle de la culture populaire. Entre-temps, l’armée et l’école font leurs les pratiques gymniques et sportives, outil par excellence de la « régénération de la race ».

JOUER AVEC L’AUTRE, JOUER CONTRE L’AUTRE

Très rapidement, les pratiquants insulaires expriment le désir de s’inscrire dans un calendrier sportif national. La volonté d’ouverture est donc précocement et clairement affirmée. En 1911, le Challenge Piccioni instaure une compétition de football commune aux clubs corses et azuréens ; malheureusement, aucun de ces derniers ne se déplace dans l’île. Après 1918, la volonté d’intégration s’exprime avec plus de force encore mais ne peut aboutir, du moins dans les sports collectifs ; dès lors, certains joueurs choisissent de faire carrière sur le continent, à l’image des footballeurs Dominique Mori et Antoine Franceschetti à l’AS Cannes. Seules des rencontres amicales rompent l’isolement. Il faut attendre 1947 pour voir s’ouvrir la première brèche avec la participation à la Coupe de France de football. Dans les sports individuels, l’intégration est plus facile, à l’exemple de Dominique Mariotti qui devient champion de France de boxe amateur catégorie poids plume en 1938.

UN NOUVEL ESPACE SPORTIF INSULAIRE

À compter des années 1960, trois éléments essentiels transforment en profondeur et redessinent l’espace sportif insulaire :

Il y a tout d’abord l’intégration progressive des clubs aux compétitions nationales, voire internationales ; ensuite, la Corse connaît une croissance démographique qui fait passer sa population de 180 000 habitants probables en 1959 à environ 220 000 en 1975 et plus de 300 000 en 2010 ; enfin, les sports et les loisirs de masse font irruption dans une île dont l’économie est délibérément tournée vers le tourisme.

À partir des années 1990, le poids de l’économie des loisirs en Corse permet le développent des sports de glisse et de nature, posant par là même de nouveaux questionnements en lien avec le développement durable et les conflits d’usage de l’espace. L’île n’en est pas moins devenue un « terrain de jeu » où se déroulent des compétitions nationales et internationales à l’image du trail « Via Romana » ou du « Corsica raid aventure ».

EN JEUX POUR DEMAIN

Depuis la fin des années 1990 les Corses participent pleinement à la mondialisation sportive, par exemple en s’adonnant aux sports de glisse. Les insulaires sont également présents dans de nombreuses pratiques aux quatre coins de la planète, tant pour leur plaisir que pour la compétition à l’instar du volleyeur Jean-François Exiga, membre de l’équipe italienne de Monza, ou de la championne d’Europe d’équitation Andrea Pulicani. Quant aux sports traditionnels, tel le football, ils continuent leurs mutations avec, entre autres, la naissance de clubs de futsal.

De nouveaux défis concernant autant les composantes socioculturelles que l’évolution démographique sont aujourd’hui lancés et devront être relevés pour réussir la diversité de la Corse de demain afin d’offrir aux jeunes générations, venues d’horizons différents, un projet commun. Déjà les réussites de Priscilla Gneto, de Stéphanie et Laurent Lokoli, de Clotilde De Bernardi, ou de Mourad Amdouni – pour ne citer qu’eux – témoignent du dynamisme de la société sportive insulaire.

La décentralisation et les nouvelles compétences territoriales issues des différents statuts particuliers de la Corse depuis 1982, renforcées en 2002, pourraient permettre à la Collectivité Territoriale de Corse (CTC) d’apporter des réponses positives dans de nombreux domaines. On songe notamment à l’accueil de nouveaux publics – par exemple les personnes porteuses de handicap ou les « seniors », de plus en plus nombreux au sein de la population insulaire. D’autre part, la Corse a réellement intégré le statut de territoire sportif organisateur de compétitions internationales, le départ du Tour de France 2013 n’en étant que l’aspect le plus visible. Il conviendra également de ne pas négliger l’amélioration permanente des infrastructures, même si dans ce domaine beaucoup a déjà été fait ces dernières années, sous peine de compromettre l’avenir non seulement du territoire mais, plus encore, de ses sportifs et de ses habitants.

Commissariat d'exposition :

Didier REY, Maître de conférences, HRD, UMR LISA, Università Di Corsica

Ludovic MARTEL, Maître de conférences, UMR LISA, Università Di Corsica

Scénographie : Philippe DANGLES.

Coordination :

Pierre-Jean CAMPOCASSO, Ethnologue régional, responsable scientifique des expositions temporaires - Musée de la Corse

Marie-Jeanne IWANYK, Chargée des expositions temporaires - Musée de la Corse.

 

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