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Ducumentu
Benito Merlino

POUR LUIGI SALVATORE...

A la fin du XIXe siècle, l'archiduc Luigi Salvatore de Habsbourg, grand aventurier, aimant par dessus tout la mer, vint à plusieurs reprises dans les îles éoliennes, où la population l'accueillit avec enthousiasme. Séduit par les traditions et les moeurs de ces gens simples, il écrivit huit volumes, illustrés de sa propre main de dessins à la plume, «Die Liparischen Inseln» qu'il publia à Prague de 1893 à 1896. Les pêcheurs de Stromboli racontent volontiers qu'il s'était épris de Maria, une jeune fille de l'île, qu'il aurait voulu ramener en Autriche et faire vivre à la cour, mais en 1900, les évènements politiques le contraignirent à rester définitivement en Autriche où il survécut de nostalgie pour les îles et pour Maria jusqu'à sa mort en 1915.

 

«Adieu mon île, rocher heureux, je dis ton nom et me tourmente,

Loin de toi si malheureux, la nostalgie toujours me hante...»

 

BENITO MERLINO,

Poète et compositeur éolien, né à Filicudi, dans la province de Messine, s'attache à cultiver la tradition musicale, la mémoire ethnologique, les mythes et légendes de la Sicile ancestrale, celle des pêcheurs et des paysans, celle des fileuses et des dentellières, dont il chante les espoirs d'une voix rugueuse comme la pierre ponce. Orangers dans le soleil, oliviers d'argent, baies azurées, grottes d'alun, jardins de corail, voici le royaume d'Eole, Dieu des vents. La Sicile du «Guépard», immobile, éternelle, surgit de ses chansons comme un trésor du fond de la mer. Il nous montre «l'autre Sicile» dans ses chansons pétries de lumière et de vent parce qu'elles sont l'écho d'une civilisation qui a sillonné les mers, extrait la pierre ponce, et cultivé l'olivier. En véritable artisan, il sculpte, peint, grave avec des mots et des notes le mouvement des saisons, la respiration de la mer, et la colère des volcans. Il a travaillé avec Atahualpa Yupanqui, Ugo Ronfani, Lanza del Vasto. Brassens et Brel étaient ses amis... Marionnettiste à ses heures, il a rapporté en France, avec «l'Opéra dei Pupi», la chanson de Roland et les légendes carolingiennes qui avaient séjourné huit siècles en Sicile... Il compose des musiques de films, fait des reportages pour la télévision et traduit de grands auteurs italiens pour les Presses de la Cité.